Stimulante incertitude

Fin mars, alors que Neuchâtel ressemblait à une ville fantôme, je me déplaçais à pied en direction de l’hôpital de Pourtalès. Le soleil brillait, les oiseaux chantaient à tue-tête. Pas de bruit de véhicules, une seule personne croisée en 20 minutes de marche. Ce moment irréel m’a permis une sorte de contemplation admirative de notre société et de sa réaction au grain de sable qui s’est inséré dans ses rouages. 

Le 29 mars, on ne savait pas combien de temps la crise durerait, ni quel serait le bilan humain qui en résulterait. Le Conseil fédéral avait tiré le frein à main de notre pays, mais personne ne n’imaginait vraiment ni quand ni comment tout cela allait redémarrer. C’est à ce moment-là que je suis passé devant l’œuvre d’André Ramseyer intitulée « Stimulante incertitude ». Un arrêt, un moment de contemplation et plein de nouvelles réflexions qui se bousculent dans ma tête.

“Stimulante Incertitude” d’André Ramseyer

Il faut savoir créer de la plus-value à partir de nos expériences. Cette crise nous a rappelé que la mondialisation à outrance, avec une concentration de la production en Asie nous coûte cher (dans tous les sens) une fois qu’un problème survient là-bas. Un retour à un meilleur équilibre géographique dans la production de nourriture, de matériel de soins, de médicaments et autres produits de première nécessité s’avère primordial. Non seulement d’un point de vue logistique, mais surtout, car cela permet de garder des emplois également chez nous. 

Le confinement a également permis un bond important en avant dans la pratique du télétravail en Suisse. Jusqu’ici réservé à quelques « cas particuliers » dans les entreprises, le travail à domicile s’est montré un instrument efficace. À titre personnel, j’ai beaucoup apprécié ne devoir faire qu’un plein par mois au lieu de chaque semaine, ne plus « perdre » 2h par jour pour me rendre à mon travail, le tout sans grosse baisse de productivité. Certes, le contact avec les collègues me manque, mais le côté convivial s’est vite retrouvé lors des Skypéros du jeudi soir. Des études sont actuellement en cours de réalisation. Elles devront démontrer les conséquences climatiques du télétravail. Ce sera là à mon avis une voie d’innovation à ne pas négliger. 

Finalement, l’impact sur la vie politique s’est également fait ressentir. Au niveau local, le Conseil communal a pris les choses en main. Le législatif ne s’est pas réuni durant plusieurs semaines et faisait plus ou moins confiance à l’exécutif. Une sorte de consensus s’est mis en place. Les partis ne communiquent pas, on ne cherche pas à brouiller un message déjà suffisamment complexe. Du coup, on se met à rêver d’une sorte de « paix des braves » où les partis se concentrent sur l’essentiel ; permettre à chacune et à chacun de retrouver une place dans notre société à la sortie de la crise. De permettre aux PME d’obtenir des conditions qui permettent une relance sans trop de douleur… mais c’est là que le rêve s’arrête. Première séance du Conseil général post-déconfinement et la gauche revient avec ses chevaux de bataille électoralistes : gratuité des transports publics, subventions à gogo et même une interpellation antimilitariste ! La pause est finie, on reprend le jeu là où on l’a laissé le 13 mars.