AVS

1 + 1 = 1,55 ?

J’ai beaucoup de chance d’avoir les parents que j’ai ! Ils se sont donné beaucoup de peine pour essayer de m’éduquer et de me donner la possibilité de choisir ma vie et ma carrière. Ça n’a pas toujours été facile pour eux, mais ils s’en sont bien sortis. C’est grâce à ma maman que je me suis lancé en politique. Elle qui devait lutter dans les années 1980 pour que ses « collègues » masculins du défunt PRD écoutent ce qu’elle avait à dire plutôt que de lui demander d’aller chercher le café[1]. Mon papa, né à la fin de la seconde guerre mondiale dans un milieu très modeste, a cravaché toute sa vie pour améliorer son quotidien puis assurer à sa famille une vie agréable. Mes parents se sont rencontrés sur les bancs d’une école professionnelle. Ils ont obtenu le même diplôme et ont travaillé un temps pour le même employeur, mais bien entendu pour un salaire différent.

Marie-Françoise Bouille et Anne-Isabeau Bueche en 1990
Marie-Françoise Bouille et ma maman en 1990.
Crédit photo : Archives historiques de l’Express

51 années de mariage cette année, ils profitent maintenant de leur retraite à Neuchâtel. Enfin quand je dis qu’ils en profitent, je devrais préciser que je parle davantage des bords du Lac que de leur AVS ! Comme on le sait, les couples mariés reçoivent conjointement 1,5 rente au lieu d’une rente complète chacun. Par contre, au niveau fiscal, c’est bien le barème du couple qui est pris en compte et qui fait grimper la facture. 

À l’heure où le parlement fédéral discute de la prochaine révision de l’AVS, qui comprendrait notamment l’augmentation de l’âge de la retraite pour les femmes et une promesse idyllique de passer la rente de couple de 150 à 155 %, il est à mon sens également urgent d’y réfléchir de manière conjointe avec la problématique de l’imposition individuelle. Actuellement, les couples de retraités mariés sont désavantagés par rapport aux couples non mariés. Ces derniers reçoivent deux rentes pleines et sont taxés avec des barèmes individuels. Un taxateur fiscal me confirmait dernièrement en toute amitié qu’un certain nombre de couples arrivant à la retraite divorçaient pour améliorer leur ordinaire. Certains restent vivre ensemble dans leur logement, les plus chanceux domicilient l’un d’entre eux de manière fictive dans leur résidence secondaire. 

Dans quelle société vivons-nous si nous « forçons » nos aînés à trouver de tels stratagèmes pour pouvoir vivre décemment ? L’équité veut que chaque personne reçoive les prestations qui lui sont dues et paie ses impôts selon ses moyens et non selon son statut marital. Le 28 août 2019, le Conseil fédéral proposait de refuser la motion de Christa Markwalder intitulée « Passage rapide à l’imposition individuelle en Suisse »[2]. Espérons que le Parlement saura soutenir les femmes et les retraités qui souffrent de cette inégalité de traitement. Dans le cas contraire, je me réjouis d’aller récolter des signatures… 


[1] http://www.lexpressarchives.ch/olive/apa/swisssnp_fr/?href=IMP%2F1990%2F06%2F25&page=27&entityId=Ar02702#panel=document

[2] https://www.parlament.ch/fr/ratsbetrieb/suche-curia-vista/geschaeft?AffairId=20193630

Texte paru dans “Libertés Neuchâteloises” du 26 mars 2021